TU SAIS QU’IL FAUT ATTENDRE
Un brin de causette avec Kaidanovsky
…tu sais qu’il faut attendre un signe
une radiation
un son pulsatile
un degré de réchauffement de plus
au-dessus de ceux déjà atteints
par l’imminence du désastre
une forme d’affection
une raréfaction qui fait gonfler tes poumons
un obscurcissement des couleurs
une autre carte du corps et de la terre
quand le noyau deviendra l’écorce
et les croûtes et les os
seront rivière de lave
dans des alvéoles rajeunies
…tu sais qu’il y aura une certaine
manière de regarder la réalité
à l’aide d’un nouveau code
qui va te mettre en action
pour un autre niveau
…tu sais qu’il faut attendre
un mot à même de connecter d’un coup
l’esprit et le coeur d’une âme
en proie à l’hypnose
pour les conduire dans un autre
système de référence
sur une autre spirale
…tu sais que la future arme d’un génocide
de masse sera sémantique
et que le meilleur temps pour toi
sera celui où personne
ne soit encore mort
bien que le meilleur temps de ceux
de ton entourage
soit le temps où tous sont déjà morts
tout en laissant derrière eux
les signes dont on rédige les nouveaux codes
qui va les lire ?
qui va les prononcer ?
qui va les sentir et goûter ?
et pour qui ?
…tu sais que tu es venu seul au monde
pour induire le champ qui efface
systématiquement tous les sens des survivants
…tu sais que ça vaut la peine d’attendre
un guide de plus
Version française par Constanţa NIŢĂ