Georges SIMON

LA NOSTALGIE

 

La nostalgie c’est l’après-midi de la vie

l’instant qui nous surprend

par les rayons d’un soleil couchant

où toutes les choses et tous les êtres

sont arrivés au pays de l’oubli

en cet instant-là et cet instant-ci

on trouve la voie de retour

vers l’amour perdu.

 

La nostalgie c’est le premier instant de la vie

à l’heure de l’évasion vers un irréversible midi

où pour un moment tu entends

la voix douce de ta mère d’antan

où s’enterre toute la nuit du mystère

où se réveille la lumière de l’amour pur

à l’écoute de notre azimut

la nostalgie c’est la lumière de l’amour pur

l’instant suprême

quand tu te réveilles et le temps s’arrête.

 

La nostalgie nous envahit

sans troubler la lumière réfléchissante

la nostalgie c’est la poésie

qu’on entend au plus profond instant

quand on a l’air que tout est perdu

sauvé par la fente d’un entre voix

par l’intervalle d’une autre fois.

 

Rien de plus pur que la nostalgie de l’amour

comme  tu es arrivé dans un pays inconnu.

La nostalgie c’est se retrouver

dans le pays d’un Innomé.

La nostalgie c’est le premier instant de la vie

quand tout est présence

où toute absence s’est dissipée

à l’écoute de ta voix intérieure

d’une antériorité vivante

 

La nostalgie c’est aussi ton jugement dernier

avant que la mort te délivre

à un autre monde imaginé

où t’attendent tes parents

où tu vas voir tous les visages

ensoleillés par le silence

où il n’y a ni passé ni présent

c’est seulement ta présence

comme instance d’une douce puissance

où tu n’es pas condamné à la liberté

mais tu es attendu comme l’imprévu

d’une présence ressuscitée.

 

La nostalgie c’est l’arrivée de l’Innocent

comme toi-même tu t’attends

d’être présent à l’appel d’un Innomé errant.

La nostalgie c’est l’arrivé d’Ulysse à Ithaque

quand il a été mis à sa dernière épreuve

celle de décrire le lit conjugale

le lieu intime comme un vrai Paradis

et où on n’a pas d’accès  que les deux initiés

et tout le reste va être avarier comme un leste

encombrante

c’est la raison pour laquelle

la nostalgie est interdit au rebelle.

 

La nostalgie c’est aussi la sortie

vers un pays récupéré

de notre enfance émerveillée.

La nostalgie c’est aussi l’entrée

par la porte ouverte

de l’âme illuminé par la lumière

qui se montre par elle-même

dans le silence de la forêt

ou dans le frémissement de la mer

où toute se réveille le petit matin

comme un tout petit enfant

c’est la rencontre face-à-face

avec toi-même devant la glace

c’est oui  toujours le oui

c’est la mélodie d’un dehors évanoui

c’est se retrouver sur la plage à la marge de l’éternité

de la mère émerveillée et de tout passé submergé.

 

La nostalgie dans nos cœurs effleurit

en se souvient du Paradis

sur l’échelle de la vie il y a des moments

ou tout se voit en tout

ou l’âme-même  devient la couleur unie

sur le blanc de l’oubli

sur les plages ensoleillées

ou le solitaire entend

les vagues de la mer

qui effacent les feux de l’Enfer

et sur le sable s’inscrit

les traces de nos pas vers le Paradis

comme des liseurs  vers une Île de Midi.

Toi, tu t’approches

en lisant les lettres qui renaissent incessant

dans le livre de l’oubli dont les pages blanches

attendent notre regard d’exorciser les idées errantes

de sublimer les pensées en contemplant

le solitaire sauvé par l’innocence.

 

Monastère d’Agapia, Roumanie